| ĐŁÎČÎčÖĐ”ÏĐ”ĐčĐž Đ”Ö á«Ïа | ĐŃа ŃŃŃŃÖŐÎŸĐž |
|---|---|
| ÔœŃΔá©ŐšŃĐ” Őž ĐŸÏá« | ΧŃÎŽ ŃĐž |
| ΩŐčа áčÎČá аĐČД᫠| ĐŃĐžŃÏ Đ»áĐżŐĄá |
| Đ«áĐŸŃá±Đ» ÎčŃŃĐč λէЎŃΞŃáŸÎ· | á±ŃáŠĐ°Ő”Ő« ŐŒĐ° |
Exposition"Alaïa and Balenciaga, sculptures of shape" à Paris, 2020. Une production signée La Mode en Images. Jump to navigation Digital CHANEL confie à Mazarine la conception et le développement de CHANEL FACTORY 5,
Je me revois Ă la fin des annĂ©es 1980 me saigner aux quatre veines rue de la Verrerie pour un caleçon de laine noire sculptural, une jupe noire fondue sur deux bodies de jersey aux dĂ©colletĂ©s de vertige, des gants mousquetaires perforĂ©s dâĆillets argentĂ©s⊠Plus tard viendront un tailleur vert bouteille ultra-cintrĂ© dâallure militaire, une ceinture-corset Ă rivets et lacets, quelques vĂȘtements encore. Leur sensualitĂ© procĂšde dâune mathĂ©matique des volumes et des proportions qui fait de la couture un exercice dâanatomie appliquĂ©e, une science exacte de la coupe provoquant des tombĂ©s Ă tomber. Cette austĂ©ritĂ© magistrale renvoie Ă Alix GrĂšs pour le biais et plus encore au grand Balenciaga pour lâĂ©pure, la structure, tous les sortilĂšges du noir. Jâai enfin une taille et des hanches, des fesses et des seins. Ma silhouette spirale en courbes comme celle dâune hĂ©taĂŻre alors quâau fond de mon cĆur bout lâardeur dâune amazone prĂȘte au combat. On peut donc exciter le dĂ©sir dâautrui et se sentir en mĂȘme temps invulnĂ©rable ? Oui et rien que pour cette vĂ©ritĂ© de plus en plus difficile Ă comprendre, toutes les femmes quâil a su si merveilleusement cuirasser et sublimer pour lâĂ©ternitĂ© lui diront merci Monsieur disparition de cet immense petit homme aux yeux noirs, fou de son travail et dâun perfectionnisme illimitĂ©, mâa Ă©mue. Elle mâa rappelĂ© que le temps passe et rĂ©vĂšle. Ici la noblesse dâĂąme, lâindĂ©pendance, la singularitĂ© chevillĂ©e Ă lâamour dâun mĂ©tier exercĂ© sans compromis ni compromissions dans la discrĂ©tion. Tout ce qui est beau est aussi difficile que rare », Ă©crit Spinoza. Ainsi le grand art dâAzzedine AlaĂŻa. Plus sculpteur que dessinateur et plus architecte que couturier, il avait lâobsession du trait et des lignes pour que ça tourne autour du corps, de profil et de dos ». Armatures, paniers, baleines, cerceaux un corps se dresse pour se tenir, lâallure tient Ă la forme, faire un corps » fut son mantra, question de maintien. Ennemi du mou et du flou, sa mode est aux antipodes de lâĂ -peu-prĂšs oversize, du relĂąchĂ© unisexe, du chiffonnĂ© transgenrĂ©. Il aurait pu vaciller avec celle du grunge et des tops anorexiques Ă la fin des annĂ©es 1990 mais non, ce qui ne lâa pas tuĂ© lâa rendu plus fort. Tant et si bien quâil est devenu lâovni du systĂšme de la mode, le meilleur rĂ©vĂ©lateur a contrario de son grĂ©garisme et de sa vulgaritĂ©. Rejetant les previews et les fashion weeks, le bling et le buzz, AlaĂŻa faisait dĂ©filer ses sĂ©ries limitĂ©es quand il Ă©tait prĂȘt, en petit comitĂ©, sans cartons dâinvitation ni photographes. DĂ©pourvu dâordinateur, nâayant jamais utilisĂ© Tweeter, il vivait dans lâantre mĂȘme oĂč il crĂ©ait et travaillait sans cesse, tenant juste table ouverte Ă lâorientale pour sa tribu de collaborateurs et dâamis. Il a habillĂ© Louise de Vilmorin et Tina Turner, Greta Garbo et Arletty, mais câest cette derniĂšre â ce mĂ©lange de la rue et dâune Ă©lĂ©gance de reine », disait-il â qui lâaura le mieux dĂ©fini en retour comme lâaristo de la gĂ©nĂ©rositĂ© », mix de chic et de gouaille qui a fait et fera toujours le meilleur de faut lire ou relire le beau livre que lui a consacrĂ© Laurence BenaĂŻm, Azzedine AlaĂŻa, le prince des lignes, Ă lâoccasion de sa splendide rĂ©trospective au MusĂ©e Galliera en 2013 Son trĂ©sor rassemble tout ce quâil a pu âcapter, voirâ⊠De toutes les images de Tunis, les plus marquantes Ă ses yeux restent celles des religieuses de Notre-Dame de Sion, avec leur cornette et leur voile blanc. âOn jouait Ă leur courir aprĂšs, jâaimais la maniĂšre dont leur habit prenait la forme du vent, elles Ă©taient belles dans leurs sandales plates, seuls leurs mains et leurs pieds avaient bruni, on aurait dit des chaussettes naturellesâ⊠Ces souvenirs sont devenus plus que des robes. Ils ont façonnĂ© une appartenance Ă une famille assez ĆcumĂ©nique, la famille AlaĂŻa, qui unit des chrĂ©tiens, des juifs, des musulmans, dans leur attachement Ă la terre et au ciel, et peut-ĂȘtre ce sens des rituels. En fĂ©vrier, quand Paris est tout gris, jâaime entrer dans cette boutique cathĂ©drale oĂč rien nâĂ©voque mieux lâĂ©tĂ© que ces robes de percale, anges du dĂ©sir, statues de sel tissĂ©, linge suspendu aux balcons du Sud, jupes aux arrondis de coupole⊠»Jâaimais aussi pousser la porte de ce lieu intemporel sans enseigne ni logo. Je nây achetais plus rien depuis le passage Ă lâeuro mais jâavais toujours joie Ă admirer les crĂ©ations du dernier des couturiers, cet homme pur qui disait que quand câest beau, il nây a pas dâĂ©poque ».
plIBItE.